Au terme de quatre heures de délibéré, la cour d’assises de la Nièvre, qui statuait en appel, a aggravé la peine infligée à Laëtitia il y a un an par la cour d’assises du Cher. Déclarée coupable de séquestration, de complicité de viols, d’actes de torture et de barbarie, et de tentatives de meurtre sur une Berruyère de 35 ans du 30 juillet au 11 août 2011, elle a été condamnée à vingt-cinq ans de réclusion criminelle. Elle s’est effondrée en larmes à l’énoncé du verdict.
Son co-accusé, Christopher, sourd et muet, a été déclaré coupable de viols sur la même victime et condamné à cinq ans d’emprisonnement dont deux ans et sept mois avec sursis, avec trois ans de mise à l’épreuve. La cour a considéré que son discernement était altéré lors des viols. Il est reparti libre du palais de justice, ayant déjà passé en prison la part de peine ferme prononcée contre lui.
L’avocate générale, Lucile Jaillon-Bru, avait requis vingt ans de réclusion contre Laëtitia, qu’elle a désignée comme étant « l’acteur principal » de cette épouvantable affaire où « les violences ont duré au moins sept jours ». L’accusée principale « a du charisme, de l’autorité, et avec elle des mineurs manipulables, ainsi qu’une victime prête à tout supporter ». Pour la représentante de l’accusation, « les actes de barbarie, la complicité de viols, la séquestration et la tentative de meurtre sont parfaitement caractérisés ».
Christopher a reconnu les viols. Mais aux yeux de l’avocate générale, il a pour lui de « raconter la scène le premier. C’est lui qui dessine les événements, qui dit c’était tous les soirs […] Vulnérable et atteint de troubles de la personnalité, il mérite une sanction juste et adaptée. J’avais requis cinq ans en première instance. Je maintiens cette réquisition aujourd’hui ».
L’avocate générale : « Vous ne la condamnerezpas à moins de 20 ans »
Concernant Laëtitia, « J’ai été bienveillante en première instance (elle avait requis 15 ans de réclusion). La cour d’assises du Cher avait bien jugé (la condamnant à 20 ans). Je pense aujourd’hui que la cour d’assises de la Nièvre ne peut condamner à moins. »
Première des deux défenseurs de Christopher, Me Fabienne Griolet a présenté Christopher comme une « victime collatérale de la séquestration voulue et orchestrée d’Odile (*). Il a vu des choses, il a fait des choses. On ne va pas vous plaider l’acquittement ». Son confrère, Me Benoît David, s’est pour sa part, concentré sur les « troubles de la personnalité » de son client. « Les institutions se le renvoient. » Il a insisté sur la décision de la cour d’appel de Bourges de « libérer Christopher après deux ans et demi d’emprisonnement. Il a d’abord été placé en hospitalisation psychiatrique sous contrainte, puis depuis le printemps en hospitalisation libre. Il est un peu apaisé. Mais il prend toujours un traitement médicamenteux lourd ».
Certes, son client a « commis un crime abject, le viol, mais le traitement des sourds et muets en incarcération est inhumain et dégradant. La détention est incompatible avec son état de santé ».
Son défenseur : « Il n’y avait aucun leader »Toute la stratégie du défenseur de Laëtitia, Me Mickaël Villemont, a été axée sur l’absence de hiérarchie dans ce « huis clos ponctué de beuveries et de défonce. Y a-t-il besoin d’une meneuse? La clef de voûte de ce dossier, c’est que Laëtitia est la meneuse ». Opposé à la thèse de l’avocate générale selon laquelle « il faut un leader et des suiveurs », l’avocat a plaidé qu’« aucun n’a été capable de dire clairement “Oui, elle m’a dit de faire ceci ou faire cela”. Tout simplement parce qu’il n’y a pas eu d’ordre ». Selon lui, c’est l’effet de groupe qui a joué : « Tous les sept, à un moment ou à un autre, ont laissé libre cours à leur imagination perverse, à leurs penchants sadiques ».
Il précisait le sens de l’appel de sa cliente : « Elle a été condamnée en première instance plus lourdement que les autres, alors que sa participation n’a pas été supérieure ». Et concluait à l’intention de la cour et des jurés : « Faites preuve de justesse ».
Jean-Christophe Henriet